lundi 8 février 2010

Ça vient d’où çà (91) : Avoir du pain sur la planche

Avoir beaucoup de travail en vue.
Avoir un travail très long et fatigant à accomplir.

L’expression “avoir du pain sur la planche” n’a pas toujours eu la même signification au cours des temps.

1. En effet son sens premier, datant de 1852, était de “pouvoir vivre sans travailler”. Signification qu’Alfred Delvau donne en 1867 en déclarant qu‘”avoir du pain sur la planche” c’est “avoir des économies ou des rentes. Argot des bourgeois”. Claude Duneton dit dans son livre “La Puce à l’Oreille“ que cette image vient de la campagne où l’on entassait le pain sur une planche fixée entre les poutres du plafond de la bâtisse.

2. Vers 1888 cette locution a pris le sens argotique d’ “avoir une collection de punitions”. Mais cette signification est tombée dans l’oubli de nos jours.

3. En 1914-1918, l’expression “avoir du pain sur la planche” prend le sens actuel d‘”avoir un long, fatigant et dur labeur à faire”. Dans le vocabulaire argotique des malfaiteurs et des soldats “la planche au pain “ est le tribunal. Hector France le décrit en 1907 en ces termes:
“Le tribunal, appelé ainsi à cause de sa position élevée, allusion à la planche à pain des chambrées de soldats, ou à la distribution qui s’y fait de jours, de semaines, de mois et d’années où l’on mange gratis le pain de l’État. Argot des voleurs.”

Notons qu’au temps des rois “manger le pain du roi” est une manière de dire que l’on est en prison, aux galères ou dans l’armée. Ainsi, par la condamnation de “la planche au pain” (= le tribunal) le prisonnier mangeait la nourriture de l’État. Cette notion de punition et de corvée à accomplir pour expier ses fautes est ensuite sortie du contexte de la pègre et de l’armée pour se répandre largement dans la population au moment de la guerre 1914-1918.

Ainsi même si jusqu’en 1922 les dictionnaires de la langue française donnaient encore à “avoir du pain sur la planche” la définition de ressource, dans l’argot populaire le sens en était tout l’inverse avec la notion d’un labeur long et fatigant à effectuer, d’un gagne pain difficile à obtenir.

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